Arracher du temps pour soi

Publié le 23 novembre 2022

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Depuis un bon moment, je suis confronté à ce qu’explique l’intellectuel et écrivain François Bégaudeau dans cette courte vidéo : mon rapport au temps. Je n’ai pas de doute quant au conseil qu’il donne ici, et j’aimerais y réfléchir un peu.

La citation exacte

« On ne comprend absolument rien à la civilisation moderne si l’on n’admet pas d’abord qu’elle est une conspiration universelle contre toute espèce de vie intérieure. »
Georges Bernanos, La France contre les robots (1947)

Quelqu’un qui se pique de créer ou d’exercer de la pensée ne devrait pas avoir à gérer son temps.

L’injonction à produire à court terme me paraît de jour en jour plus absurde. Le tout poussé par une économie de l’attention dont nous sommes les esclaves volontaires.

J’ouvre ici une parenthèse à propos de cette dernière remarque. Dans le domaine de la création, l’économie de l’attention fait de très gros dégâts. La concurrence du tous contre tous a permis à des “stars” du web, encouragé par des algorithmes, de capter l’essentiel des internautes ne laissant que des miettes aux autres. Mettant en grand danger l’idée de pluralisme. C’est particulièrement spectaculaire sur des plateformes de types YouTube. Hélas, l’attention du public est une ressource finie.

On pourrait penser que les nouveaux “tuyaux” ont démultiplié les possibilités et que jamais la création n’a été aussi bouillonnante le web : YouTube, Instagram, Twitch, Spotify, Tik Tok etc. C’est en partie vrai.

Plus consommateur qu’acteur

La démultiplication invisibilise et pousse à faire toujours plus pour trouver sa place. J’ai fait le pari d’investir mon blog. Cela revient un peu à se retrancher chez soi. C’est vrai. Mais, cela permet aussi de penser la création sur le temps long et cesser d’espérer un succès hasardeux.

Le temps est la clef

Je suis persuadé que l’engagement est le garant de la qualité d’une proposition, qu’elle trouve son public ou non. Mesurer sa valeur à l’aune de sa visibilité me semble pour le moins critiquable. D’autant plus si cette exposition n’est due qu’au fait de recommandations automatisées.

J’y vois le risque de disparition des notions d’exigences, de réflexions, de savoir-faire, qui sont nécessaires à la vitalité des pratiques artistiques.

La si belle expression se mettre à l’ouvrage et la composante temporelle qui l’accompagne s’éteignent au profit de la sacro-sainte productivité. Cette économie est fondée sur le temps pris et non sur le temps donné. La distinction est subtile.

Une pratique vertueuse

Depuis la soudaine notoriété du Fedivers pour les raisons que l’on sait, Mastodon est le seul réseau social que j’ai investi, mais pas comme avant. Puisqu’il n’y a pas d’algorithmes, il est nécessaire d’être mesuré dans ses partages et de privilégier la qualité à la quantité, garantie d’interactions saines et d’économie de temps. Je parle quand j’ai besoin de parler.

J’évite autant que possible le phénomène de réseau en nettoyant ma liste de followers dès que la pertinence n’est pas au rendez-vous. Enfin, je rassemble toute ma veille (y compris celle du Fedivers) dans un unique lecteur de flux RSS. Résultat : mon tour réflexe (si cher à l’ami Ploum) ne me prend pas plus de 10 min par jour, sans compter les mails. (C’est toujours un peu long les mails). 😅

Le bénéfice est colossal et le syndrome FOMO largement atténué. J’ai rédigé ce billet en prenant le temps nécessaire à sa réflexion et non pas pour obéir à une plateforme. Tout le monde y gagne.

Comme évoqué par F. Bégaudeau, redonner du temps à l’essentiel ; ma famille mes amis et mes créations est un excellent investissement. Quant au surplus, car il y en a, je le réserve aux autres. Au-delà de l’aspect politique, il ne s’agit que d’une quête de sérénité et de bien être. La satisfaction d’être ouvert au monde.


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Je m'apelle Dimitri Régnier. Je suis auteur radiophonique indépendant. J'écris, j'enseigne, je fais du podcast et de la radio.
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